Actualisation des actes de biologie médicale relatifs au diagnostic de la strongyloïdose

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Dans le cadre de l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a sollicité l’avis de la HAS sur la révision de la Nomenclature des actes de biologie médicale (NABM) concernant le diagnostic biologique de plus de 20 infections en parasitologie et en mycologie. La HAS publie en cette fin avril, un argumentaire traitant des actes relatifs au diagnostic de la strongyloïdose (anguillulose).

Par Steven DIAI, publié le 28 avril 2017

Actualisation des actes de biologie médicale relatifs au diagnostic de la strongyloïdose

La strongyloïdose (ou anguillulose) est une helminthose des zones tropicales due à Strongyloïdes stercoralis. Il s’agit d’un nématode (ver rond) sexué dont les adultes vivent enchâssés dans la muqueuse duodéno-jéjunale. L’homme en est le réservoir principal. La contamination d’un individu se fait par pénétration de la larve à travers la peau, principalement au niveau des pieds. En l’absence de traitement, son cycle d’auto-infection (interne à l’hôte) pérennise durant plusieurs décennies le parasitisme.

L’objectif du travail de la HAS était d’évaluer la pertinence des propositions de modification des actes de diagnostic de la strongyloïdose (anguillulose) en précisant leurs indications et les techniques utilisées.

La demande de la CNAMTS portait notamment sur la modification du libellé d’un acte déjà inscrit à la NABM (recherche sur selles) et sur l’inscription d’un autre acte (sérologie) : • pour la recherche dans les selles, il s’agit de préciser son indication « diagnostic de certitude » ; • pour la sérologie, il s’agit de créer un acte de recherche d’anticorps anti-Strongyloïdes stercoralis en précisant la technique utilisée (technique immunoenzymatique).

Mise en évidence des larves de Strongyloïdes stercoralis

Le diagnostic de certitude repose sur l’observation des larves de S. stercoralis dans les selles. Cette observation nécessite un examen parasitologique des selles « classique » auquel peut être ajoutée la méthode de Baermann. Il s’agit d’une technique d’extraction basée sur la capacité des larves à être attirées par l’eau et la chaleur. En effet, les larves de strongyloïdes ont des propriétés d’hygrotropisme et de thermotropisme qui permettent d’améliorer la sensibilité de l’examen parasitologique des selles. Les larves se concentrent ainsi dans un petit volume d’eau tiède et sont plus faciles à découvrir. La technique consiste à prélever un échantillon de selles fraîches et de le placer sur une compresse qui tapisse une passoire métallique. Cet ensemble est positionné dans un entonnoir dont l’extrémité est bouchée. L’entonnoir est rempli d’eau tiède jusqu’à recouvrir les selles. Les larves vont passer dans l’eau et sédimenter vers l’extrémité de l’entonnoir. Le liquide de l’extrémité est récupéré et centrifugé et le culot est examiné au microscope pour rechercher des larves mobiles de S. stercoralis. Pour les formes malignes, le diagnostic peut passer par la mise en évidence des larves de S. stercoralis dans des produits biologiques tels que notamment le liquide gastrique, le liquide cérébrospinal et le liquide de lavage broncho-alvéolaire.

Sérologie : recherche des anticorps sériques

Il existe des tests sérologiques notamment fondés sur la technique immunoenzymatique de type « ELISA », qui permettent de détecter des anticorps anti-S. stercoralis de type IgG. Deux tests commerciaux ont été identifiés et sont utilisés en France dans au moins 14 laboratoires de biologie médicale . Ces deux tests diffèrent par les antigènes (Ag) utilisés pour mettre en évidence les Ac sériques dirigés contre S. stercoralis ; l’un utilise des Ag de S. stercoralis, l’autre des Ag de S. ratti 6.

Les performances diagnostiques de cinq tests (dans le diagnostic de la strongyloïdose) ont été synthétisées dans une revue de 2014. Cette étude révèle des performances diagnostiques élevées au-dessus de 90 % à la fois pour la sensibilité et la spécificité. Cependant, la principale limite de ces études, relevée par les auteurs de cette revue, réside dans la définition du test de référence. En effet, ce dernier est composite. Il intègre les résultats des examens de selles et les résultats de la sérologie (afin de pallier le manque de sensibilité de l’examen des selles). Ces études, avec ce type de test de référence, ne permettent pas d’évaluer les performances diagnostiques de la sérologie. Une approche intégrant le gain du nombre de cas identifiés par la sérologie en plus de l’examen des selles pourrait être privilégiée. Une seconde limite consiste en ce qu’un résultat positif à un de ces tests ELISA ne permet pas de porter le diagnostic de strongyloïdose avec certitude pour deux principales raisons : • ces tests manquent de spécificité et détectent par réactions croisées des Ac dirigés contre d’autres parasites responsables d’helminthoses comme les filarioses, schistosomoses, ascaridioses ; • ces tests recherchant des IgG, ils ne permettent pas de distinguer les formes actives de la maladie où l’infestation est active (sans forcément de signes cliniques ou biologiques évocateurs) des cas anciens résolus pour lesquels les IgG peuvent persister dans l’organisme. La durée et la cinétique de diminution du titre d’anticorps après traitement et guérison ne font en outre pas consensus.

La sérologie est actuellement utilisée dans deux situations : le diagnostic des personnes migrantes originaires de zone d’endémie ou des voyageurs revenant de ces mêmes zones, et chez des patients ayant un historique de séjours dans des zones d’endémie, avant l’induction d’une immunodépression ou au cours d’une immunodépression devant des symptômes évocateurs ou porteur de HTLV-1.

Conditions actuelles de prise en charge par l’Assurance maladie

La recherche des larves de strongyloïdes dans les selles par recherche directe est d’ores et déjà inscrite sur la NABM : « Recherche sur selles récemment émises, des larves d’anguillules par la technique d’extraction de Baermann » (code 0264). L’indication de ce dernier acte n’est pas précisée, ce qui est l’objet de la demande. Il faut noter que cette recherche de larve intervient après la réalisation d’un examen parasitologique des selles « classique » (code 0286 ou 0287).

À l’inverse, il n’existe pas actuellement d’acte de sérologie dédié spécifiquement à la recherche des Ac anti-Strongyloïdes. La NABM comporte cependant un acte générique de sérologie pourune infection parasitaire sans mention de l’espèce dont le libellé est « Sérodiagnostic d’une infection parasitaire ne figurant pas par ailleurs à la nomenclature » (code 4362).

Le Tableau ci-dessous qui présente la demande, contient également l’état actuel de la NABM et renseigne le nombre de réalisations pour les années 2014 et 2015.

Crédit photo : HAS

Résultat de l’évaluation

Afin d’approcher le nombre de réalisation des recherches d’Ac sériques anti-S. stercoralis en France, un fabricant et un distributeur des kits ELISA en France identifiés au cours de ce travail, ainsi que 14 laboratoires de biologie médicale les utilisant, ont été contactés. Cette démarche a permis d’estimer le nombre de sérologies réalisées par les utilisateurs des kits ELISA et le nombre de résultats positifs. Environ 9 000 recherches d’Ac anti-S. stercoralis, avec plus de 900 résultats positifs, seraient réalisées en France par an. Il faut noter qu’un résultat positif ne signe pas obligatoirement une infection active à S. stercoralis compte tenu des deux limites énoncées ci-dessus. La recherche d’Ac sériques par EIA est donc diffusée et utilisée en France.

Il ressort de l’analyse de la littérature les points suivants :

La littérature analysée est composée de huit recommandations de bonne pratique. Ces huit recommandations sont récentes et de bonne qualité méthodologique.

Toutes préconisent la sérologie (recherche des Ac sérique anti-S. stercoralis) et cinq sur huit préconisent l’examen des selles dans le diagnostic de la strongyloïdose.

La positivité de l’un ou l’autre de ces examens conditionne l’administration d’ivermectine.

La seule technique mentionnée pour la sérologie est immunoenzymatique (« ELISA »)(deux recommandations). Aucune technique n’est mentionnée pour l’examen des selles.

La séquence des examens n’est pas formellement établie, ils sont souvent concomitants.

Les principaux éléments rappelés par les recommandations sont :

• la positivité de l’examen des selles (la recherche des larves de Strongyloïdes stercoralis dans les selles par examen parasitologique des selles « classique » puis par extraction avec la « méthode de Baermann » réitérée trois fois sur plusieurs jours).apporte « le diagnostic de certitude » ;

• la sensibilité de la sérologie est meilleure que celle de l’examen des selles qui doit être répliqué plusieurs fois pour pallier cette faible sensibilité ;

• des réactions croisées de la sérologie avec d’autres parasitoses sont possibles notamment avec les filaires.

Les principales populations cibles mentionnées par les recommandations sont :

• les personnes migrantes ou réfugiées originaires de zone d’endémie à leur arrivée ;

• les patients présentant des signes cliniques évocateurs d’une strongyloïdose (sous traitement immunosuppresseur ou non) ;

• les patients originaires ou ayant vécu en zones d’endémie, avant la mise sous traitement immunosuppresseur (notamment corticothérapie à dose élevée au long cours).

Source : HAS

La rédaction

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