IGEM 2023 - Toute la biologie de synthèse mondiale à Paris
Le vingtième anniversaire de l'IGEM, est "the place to be" ce week-end pour découvrir toute l'actualité de la biologie de synthèse. Si toutes les applications sont représentées, la place des solutions diagnostics et thérapeutiques n'est pas en reste. Un salon, compétition, rencontres à l'ambiance exceptionnelle et où les idées foisonnent.
Pour comprendre où on met les pieds en arrivant au hall 7.3 du parc des Expo de la Porte de Versailles à Paris, ce week-end du 4-5 novembre, il faut resituer ce qu’on entend par « biologie de synthèse, ou biologie synthétique ».
C’est quoi la biologie de synthèse ?
L’expression n’est pas forcément très connue en France, où le secteur n’est pas souvent représenté pour lui-même mais seulement via ses applications dans différents domaines. La biologie de synthèse est la combinaison d’éléments biologiques (cellules, adn, etc) avec des principes d’ingénierie dans le but de construire de nouveaux systèmes, de nouvelles fonctions biologiques. Des applications peuvent en découler dans tous les domaines : agriculture, énergie, santé, électronique etc.
La recherche en biologie synthétique porte à la fois sur notre compréhension du vivant via des process de (re)construction et à la fois sur les applications possibles : construire de nouveaux systèmes ou organismes assurant des fonctions précises au service de nos intérêts. Elle prend notamment la forme du génie génétique quand elle porte sur l’ADN, mais elle peut aussi donner des complexes totalement hybride quand des systèmes bioélectroniques.
C’est quoi l’IGEM ?
Au départ en 20303-2004 l’iGEM (pour International genetically engineered machine competition) c’est seulement une compétition de biologie de synthèse qui est née au MIT à Boston (USA). Mais très vite, la compétition qui réunissait 5 équipes a grossi et aujourd’hui, à Paris, elle en accueille 400 issues de 66 pays pour la phase finale, le grand Jamboree. Mais au départ, cela représente 75000 participants à travers le monde !
Et du coup, on s’en doute, l’IGEM n’est plus seulement une compétition, c’est toute une communauté, un état d’esprit qui inonde toute la biologie synthétique mondiale et qui cherche à structurer, fournir des normes d’éthiques, promouvoir la biologie synthétique.
Une compétition aux résultats « open »
Les équipes sont libres, le plus souvent issues d’une école ou de plusieurs écoles proches, elles sont parfois très hétéroclites en terme de parcours et d’origine, à l’instar de l’équipe Paris Bettencourt de cette édition 2023 où les membres viennent de pays différents avec des spécialités en biologie mais aussi en informatique ou en commerce. Car les étudiants sont invités à se débrouiller seuls tant pour l’aspect scientifique du projet, pour lequel toutes les équipes reçoivent un kit de briques de bases (vecteurs de clonage, promoteurs, terminateurs, etc) que pour trouver d’éventuels sponsors, se renseigner auprès d’industriels pour donner à leur projet une véritable dimension concrète et applicable, même s’ils ne dépassent pas la preuve de concept. Les résultats de leur recherche sont libres d’être exploités par d’autres équipes ensuite ou même par des industriels.
Pourquoi IGEM a lieu à Paris depuis 2 ans ?
La question, posée à Randy Rettberg, président de l’IGEM, se pose en effet : pourquoi être parti de Boston, loin du MIT pour organiser ce grand événement ? Pour s’ouvrir, pour trouver autre chose, un autre environnement, pour avoir un pied en Europe où le tissu de la recherche est très riche aussi explique le président. Et ajoute-t-il » à ce titre l’accueil à Paris a été à la hauteur, tant d’un point de vue scientifique que pour l’organisation et la mise en réseau avec le monde industriel ». Car il faut comprendre que l’IGEM a maintenant une autre dimension : transformer les résultats en start-up qui donnent un véritable élan à la biologie synthétique. Il y a d’ailleurs à présent entre 200 et 250 start-up qui sont directement issues de l’IGEM. Enfin, à Paris, aussi, c’est un lieu propice pour travailler sur des normes, sur l’éthique et la responsabilité, un crédo très fort des organisateurs, qui veulent mettre la biologie synthétique au service de « démocraties renouvelées », fondées sur le pouvoir local des populations à subvenir elles-mêmes à leur besoin grâce à leurs ressources et leur technologies locales. C’est ainsi qu’en parallèle de la compétition, une conférence en partenariat avec l’OCDE a vu le jour sous le nom de « IGEM Responsability »
Et pour la France, pourquoi c’est important que IGEM s’installe à Paris ?
Pour Xavier Duportet, ancien IGEMeur et aujourd’hui CEO et cofondateur de Eligo Biosciences, « la biologie synthétique prend un véritable essor en France depuis une dizaine d’années, sous l’influence notamment d’ancien IGEMeur qui essaime dans des structures de recherches comme l’institut Pasteur, le Génopole ou en fondant des start-up ». La présence d’IGEM à Paris est « une opportunité incroyable » et « l’occasion de mettre en lumière la biologie synthétique ». Avec l’espoir que le pouvoir politique et financier « saississe la portée des changements potentiels que la biologique de synthèse peut amener et qu’ils planchent sur un plan stratégique de l’ingénierie du vivant qui permettrait de soutenir la recherche pas seulement sur les applications mais aussi la recherche plus fondamentale sur le fonctionnement de l’adn, des cellules, fondement de la biologie synthétique et brique fondamentale d’où découle le reste ».
Qu’est-ce qu’on trouve sur IGEM ?
Des jeunes, pleins de jeunes évidemment !
Des industriels, fournisseurs de logiciels, d’équipements de laboratoires, de produits de base…
Des clusters de recherche et des incubateurs comme le Genopôle qui soutient les équipes d’IGEM depuis le début des participations françaises et qui proposent aux équipes de profiter de ses installations, laboratoires etc si besoin.
Et aussi plein d’idées issues des projets présentés par les différentes équipes. Par exemple, pioché au sein des présentations des villages « diagnostics » et « thérapeutics » :
- Prévenir la formation de biofilm sur les cathéters urinaires
- transformer un sang de groupe B à A
- fabriquer un biocapteur ingérable pour caractériser les métabolites intestinaux liés à la dépression majeure
- construire une solution aux pathogènes antibiorésistants
- détecter les endométrioses avec une association micro ARN et protéines CAS
- quantifier le lithium sur un appareil point-of-care via un riborégulateur… etc
Un show(room), qui brasse des humains, des idées et des potentialités du monde entier.