Pour un dépistage organisé du cancer du sein personnalisé, plus humain et mieux coordonné

Cancer du sein

Biologiste infos

Afin de moderniser le dépistage organisé du cancer du sein, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé souhaite que toutes les femmes, quel que soit leur âge ou leur niveau de risque, bénéficient désormais d’un suivi personnalisé, mieux coordonné et impliquant davantage le médecin traitant.

Par Steven DIAI, publié le 20 avril 2017

Pour un dépistage organisé du cancer du sein personnalisé, plus humain et mieux coordonné

Le nouveau programme lancé le 6 avril 2017 renforce l’information de toutes les femmes et prévoit notamment la mise en place de deux consultations dédiées à la prévention, une à 25 ans, prise en charge à 100 % par l’Assurance maladie, et une à 50 ans.

En France, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. C’est aussi la première cause de mortalité par cancer, avec près de 12 000 décès par an. « Pourtant, s’il est détecté tôt, ce cancer est guéri dans 9 cas sur 10, rappelle Marisol Touraine. Son dépistage est donc un enjeu majeur de santé publique ; pour réduire la mortalité et la morbidité liées au cancer du sein, mais également pour améliorer la qualité des prises en charges des personnes concernées ».

En octobre 2016, à l’issue d’une grande concertation citoyenne et scientifique, la ministre des Affaires sociales et de la Santé avait annoncé la prise en charge à 100 % par l’Assurance maladie d’examens de dépistages supplémentaires pour les femmes particulièrement exposées. Début avril, la Ministre a lancé un nouveau programme de dépistage organisé du cancer du sein, qui renforce l’information des femmes dès 25 ans et améliore le suivi de toutes les femmes.

Ce programme de dépistage renouvelé s’appuie sur les recommandations remises à la ministre par l’Institut national du cancer (INCa), suite à la remise du rapport du comité d’orientation de la concertation citoyenne et scientifique lancée en 2015 sur le sujet.

Une meilleure information des femmes à 25 ans

Une consultation dédiée à la prévention de tous les cancers sera proposée aux femmes de 25 ans pour les sensibiliser à l’intérêt du dépistage et les informer sur les modalités de dépistage ou de suivi, selon les antécédents et les facteurs de risque de chacune. Cette consultation sera également l’occasion d’informer les femmes sur le dépistage du cancer du col de l’utérus, et plus globalement sur les facteurs de risques comportementaux (tabac et alcool, habitudes alimentaires, activité physique, etc.), la contraception ou les infections sexuellement transmissibles. Elle sera intégralement prise en charge par l’Assurance maladie dès le 1erjanvier 2018.

De 50 à 74 ans : un suivi personnalisé, coordonné

Une seconde consultation dédiée à la prévention et au dépistage sera proposée aux femmes à 50 ans, organisant un suivi personnalisé prenant en compte leurs éventuels facteurs de risque. Par ailleurs, l’échographie prescrite si nécessaire en complément de la mammographie, sera réalisée sans dépassements d’honoraires à compter de 1er janvier 2018.

Le plan d’action comprendra 10 mesures :

1) Mise en place d’une consultation à 50 ans dédiée à la prévention et au dépistage

Cette consultation abordera :

A – Le dépistage du cancer du sein :

o en identifiant les facteurs de risque auxquels la femme est exposée (habitudes, mode de vie) ;

o en évaluant son niveau de risque, au regard de ses antécédents familiaux et personnels ; o en examinant quels dépistages ont déjà été réalisés et à quel rythme ;

o en définissant les modalités de dépistage ou de suivi adaptées au niveau de risque de la personne (en fonction des antécédents personnels et familiaux, de l’existence de symptômes).

B – Le dépistage et la détection précoce d’autres cancers, notamment celui du cancer colorectal et celui du cancer du col de l’utérus ; en remobilisant, pour ce dernier, la femme sur l’utilité de poursuivre le frottis même après 50 ans ;

C – Les éléments de prévention primaire pertinents et de modification de comportements compte-tenu de ses propres facteurs de risque (tabac, alcool, habitudes alimentaires et activité physique). L’approche globale de cette consultation pouvant initier certains changements de comportement aura des effets positifs sur d’autres pathologies et leur prévention.

2. Une information rénovée, plus complète, directement accessible pour chaque femme

Un outil-ressource web personnalisé sera disponible sur e-cancer.fr.

3. Une information personnalisée des femmes par des professionnels de santé mieux formés et informés

Des outils avec des informations et des données seront plus largement diffusés à tous les acteurs professionnels (médecins traitants, gynécologues) et associatifs, les aidant à délivrer une information complète et personnalisée sur les avantages, mais aussi sur les risques et sur les limites du dépistage. Des formations seront mises à la disposition des professionnels de santé afin de leur permettre d’engager le dialogue avec leurs patientes et de les accompagner dans leur prise de décision.

4. Un accès des femmes au dépistage organisé facilité par les professionnels de santé

Médecins traitants et gynécologues pourront s’appuyer sur des outils informatiques comme les « serveurs d’éligibilité » qui permettent aux médecins d’interroger la base d’invitation des structures de gestion des dépistages organisés. Ils pourront également proposer aux femmes de 50 à 74 ans à risque moyen une intégration dans le programme du dépistage organisée et éditer un bon de prise en charge à 100 % pour une mammographie de dépistage directement depuis leur espace pro.

5. Une accessibilité facilitée par la levée des freins financiers

Si elle s’avère nécessaire en complément de la mammographie, l’échographie sera désormais réalisée, dans le cadre du dépistage organisé, avec un tarif opposable supprimant la possibilité de dépassements d’honoraires, par avenant conventionnel.

6. Une accessibilité facilitée par la lutte contre des difficultés d’accès géographique ou culturel

Pour lutter contre les difficultés d’accès géographique, des expérimentations seront mises en place. Pour lutter contre les freins d’ordre culturel, les modalités d’information seront diversifiées grâce aux leviers introduits par la loi de modernisation de notre système de santé : la médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique.

7. La qualité de la prise en charge de la femme lors du dépistage sera améliorée

L’approche sera plus humaine et personnalisée : lettre d‘invitation revue, documents d’information, information délivrée par le médecin.

8. La qualité en radiologie et en anatomo-cytopathologie sera améliorée

En radiologie, les indications de l’échographie en complément de la mammographie seront précisées par la HAS. La HAS sera saisie d’une demande de mise à jour de ses recommandations de 2013, pour tenir compte de nouvelles publications scientifiques et rechercher un consensus sur la réalisation d’une échographie en association chez les femmes ayant une densité mammaire de type 1 ou 2.

Par ailleurs, en anatomo-cytopathologie, une reconnaissance de la compétence en sénologie des anatomo-cytopathologistes sera mise en place en s’appuyant sur une formation spécifique et un contrôle de qualité externe, se référant à des valeurs seuil de pratique. Une expérimentation d’une double lecture anatomo-cytopathologique des lésions frontières à fort risque de surdiagnostic sera lancée par l’INCa dans les trois prochaines années. Ces lésions, dont la fréquence est faible, le diagnostic délicat et l’évolutivité difficile à évaluer, ne constituent pas une urgence thérapeutique. La confirmation ou l’infirmation diagnostique via une 2nde lecture régionale par des structures régionales expertes peut ainsi être organisée dans des délais raisonnables. Enfin, une définition de comptes-rendus standardisés d’anatomo-cytopathologie, accompagnée d’une organisation de la diffusion automatisée de comptes-rendus aux structures de gestion du dépistage permettant l’évaluation des pratiques et du programme, sera faite par un groupe de travail réunissant les représentants des professionnels concernés (sociétés et syndicats d’anatomo-cytopathologie).

9. Rapprocher la qualité du dépistage individuel de la qualité du dépistage organisé

Des interventions auprès des professionnels de santé seront mises en œuvre pour limiter les pratiques de dépistage individuel hors des recommandations de bonnes pratiques de la HAS (tranche d’âge, fréquence des examens), afin d’éviter des pertes de chance générées par des dépistages individuels non justifiés.

10. Développer la recherche pour améliorer la qualité des connaissances et des pratiques

Il s’agira de développer la recherche pour limiter le sur-traitement :

o Des appels à projet seront lancés pour : – améliorer la performance des procédures de dépistage, mieux préciser les options thérapeutiques, réduire ainsi le surdiagnostic et le surtraitement ; – évaluer des risques associés au dépistage ; – identifier les biomarqueurs pronostiques de l’évolution et de l’agressivité du cancer du sein ; – identifier les biomarqueurs de prédisposition génétique.

o Les projets de recherche portant sur les outils et méthodes d’évaluation du niveau de risque, dont le scoring, permettant d’orienter au mieux les personnes vers un dépistage plus personnalisé seront soutenus.

o Un programme d’action intégré de recherche sur les formes précoces des cancers du sein sera lancé. o Des projets français sur le dépistage du cancer du sein dans le cadre de l’appel à projets européens Transcan 2017 (Minimally or non invasive methods for early detection and /or progression of the disease) seront également soutenus.

Il s’agira aussi de développer la recherche pour mieux mesurer l’impact du dépistage :

o Observation des stades de diagnostic en fonction des modes de détection ou des pratiques de dépistage ;

o Réalisation d’une analyse comparée des trajectoires de prises en charge (mastectomie, radiothérapie, etc.) en fonction du mode de dépistage ou de diagnostic ; Modélisation de l’impact du programme de dépistage sur la mortalité à l’aide des données françaises des registres et des bases des structures de gestion, notamment le nombre de décès évités par an.

Il s’agira enfin de développer la recherche interventionnelle visant à réduire les inégalités d’accès ou de recours au dépistage.

10. Développer la recherche pour améliorer la qualité des connaissances et des pratiques

« La meilleure chance pour guérir du cancer du sein, c’est le dépistage. Pourtant, encore trop peu de femmes ont recours au dépistage organisé. C’est pourquoi je veux que chaque femme de 25 ans bénéficie d’une consultation dédiée et que chaque femme à 50 ans bénéficie d’un suivi plus personnalisé. Donner un nouvel élan au dépistage du cancer du sein pour mieux garantir la santé des femmes, c’est tout l’objet de ce programme », a déclaré Marisol Touraine.

Source : Rapport intitulé : Plan d’action pour la rénovation du dépistage organisé du cancer du sein

La rédaction