Les cabinets de médecins pathologistes fragilisés par les rachats des grands groupes d’investissements
L’organisation professionnelle des médecins spécialistes en anatomie et en cytologie pathologiques s’alarme, dans un communiqué, d’un mouvement de rachat des cabinets médicaux et de la volonté des groupes financiers d’agréger l’anatomopathologie à la biologie médicale.

Selon le syndicat des médecins pathologistes français (SMPF), cette situation « menace l’exercice libéral et la nature même de la spécialité, qui fait le lien entre la clinique et la biologie. »
Le syndicat rappelle en effet que « le cœur de métier de l’anatomie et cytologie pathologiques (ACP) est le diagnostic des cancers sur biopsies ou autres prélèvements de tissus. » De ce fait, « le médecin ACP doit rester proche de l’équipe prenant en charge le patient, […] à savoir le spécialiste d’organe/chirurgien et l’oncologue, à l’hôpital ou en secteur libéral,afin d’y jouer tout son rôle. »
Le syndicat souligne les distinctions entre ACP et biologie médicale, précisées dans le rapport sur l’ACP publié en 2012 par la Direction générale de l’offre de soins, ainsi que dans l’ordonnance de 2013 portant réforme de la biologie médicale, et affirme « la nécessaire indépendance des deux spécialités. » Cette indépendance « qui doit aussi valoir vis-à-vis des financiers » est mise à mal par une dynamique actuelle de rachats des cabinets d’ACP par de grands groupes d’investissements. Fonds de pension, d’investissements et laboratoires de biologie ont en effet commencé à racheter massivement des cabinets d’ACP.
L’ACP fait le lien entre la clinique et la biologie
Les médecins ACP savent que « les évolutions scientifiques actuelles doivent et vont accroître la collaboration entre médecins ACP et biologistes. » Ils revendiquent toutefois leur spécificité, à la jonction de la clinique et de la biologie. Frédéric Staroz, président du SMPF, rappelle que « la biologie est devenue de plus en plus industrielle, alors qu’en ACP, le diagnostic dépend pleinement de l’expertise médicale. De plus, la préparation des prélèvements ne peut être automatisée et demande de la part des techniciens de laboratoires des compétences très spécifiques à l’ACP. […] L’ACP doit rester, pour le service des patients et des cliniciens les prenant en charge, l’intégrateur et le « traducteur » de l’ensemble des informations [du génome]. »
Risque sur l’utilisation des prélèvements
Le SMPF s’interroge aussi sur les raisons qui motivent ces groupes financiers à racheter l’ACP. « S’agit-il d’un moyen pour réaliser une croissance externe dans un contexte où le marché de la biologie « stagne » ? Les acheteurs veulent-ils par ces achats s’assurer une forme de monopole sur les prélèvements en cancérologie ? », se demande Frédéric Staroz.
Et le président d’ajouter : « C’est à partir des prélèvements en ACP que les tests génomiques dont dépendent la médecine personnalisée et les thérapies ciblées, se feront. Si cette dynamique de rachat se poursuivait, la réalisation de ces tests, qui donnent un accès à toute l’information génétique des patients, serait du coup entre les mains d’un faible nombre d’acteurs privés, fonds d’investissements ou multinationales. » En conséquence, le syndicat des médecins pathologistes français porte plainte contre X devant le procureur de la République pour alerter l’Etat face à ces pratiques.