Séance spéciale VIH à l'Académie de pharmacie

VIH

Biologiste infos

Aujourd'hui se tient un colloque sur le VIH à l'Académie de Pharmacie de Paris. Sa thématique : « L’infection à VIH : les nouveaux enjeux », avec une intervention sur le dépistage cet après-midi à 14h30, qui sera menée par le Dr France LERT, Directrice de Recherches, INSERM. Elle est intitulée « Dépistages : tout a changé et cela ne se sait pas encore »

Par Steven DIAI, publié le 14 octobre 2015

Séance spéciale VIH à l’Académie de pharmacie

Voici un résumé préalable de cette séance écrit par le Dr Lert :

La mise au point du test de dépistage a été l’une des toutes premières avancées dans la lutte contre le sida. Depuis, les outils et les stratégies de dépistage n’ont cessé d’évoluer à mesure des autres progrès, avant tout les progrès du traitement, puis ceux sur la compréhension de l’infection et de son épidémiologie.

Aujourd’hui le dépistage est la clé de tout, tant au niveau individuel pour les personnes atteintes avec un bénéfice maximum des traitements antirétroviraux aujourd’hui plus efficaces, plus simples et bien tolérés, qu’au niveau populationnel. Alors que l’on dispose aujourd’hui en théorie des moyens de casser l’épidémie en quelques années si l’on traitait tous les sujets séropositifs (on le sait depuis 2009, Granich,2009), elle ne baisse que lentement voire pas du tout, en particulier dans le groupe le plus exposé des hommes ayant des rapports entre hommes, et ceci en France comme ailleurs.

Scientifiques et organisations internationales s’accordent aujourd’hui sur la stratégie de prévention combinée qui consiste à identifier puis à traiter toutes les personnes infectées, pour réduire au maximum la réplication virale et réduire, voire éliminer, le risque de transmission sexuelle. Des essais cliniques récents ont montré le bénéfice du traitement précoce (ANRS- START et ANRS-TEMPRANO), en termes de réduction de la morbidité ainsi que le bénéfice du traitement de la primo-infection en termes de réduction de la taille du réservoir (VISCONTI, ANRS- OPTIPRIM) et d’efficacité préventive (PARTNERS). Depuis 2013, les recommandations françaises sont d’initier le traitement dès le diagnostic et ce, quels que soient le niveau de l’immunodépression et le stade clinique.

Le dépistage peut désormais bénéficier de tests performants (tests combinés Antigène-Anticorps de 4eme génération), de tests rapides qui peuvent être réalisés hors des centres de soin, et maintenant de l’autotest. L’ensemble de ces tests va permettre à chacun de choisir et de réaliser pleinement le message des années 90 « Vous seul pouvez lever le doute » (campagne Mairie de Paris en 1991.

Les recherches en santé publique et sciences sociales sur les attitudes et les comportements de dépistage dans différentes populations ont permis d’identifier de nouvelles pistes et vont permettre d’orienter une nouvelle politique de santé publique :

– Informer clairement sur le double effet thérapeutique et préventif du traitement antirétroviral, ce qui n’a toujours pas été fait depuis 2008 et informer sur les nouvelles offres de dépistage.

– Augmenter fortement le niveau du dépistage avec des messages clairs adressés à chaque groupe à risque (le dépistage ciblé et non plus universel), et en complémentarité des dispositifs (médecine générale, CDAG qui deviennent CeGIDD en 2016, dépistage communautaire « hors les murs », dépistage chez soi et dépistage entre partenaires).

– Utiliser tous les outils de test existants sans hiérarchie de leur performance biologique

– Lever les freins à l’utilisation du test rapide (notamment la prise en charge par l’assurance maladie) dans tous les contextes (médecine générale, urgences etc.).

– Mobiliser les acteurs de santé, les pharmaciens dans leur rôle nouveau pour l’offre des auto-tests, les généralistes à la mesure du profil épidémiologique de l’infection sur leur territoire, les services spécialisés pour rapprocher encore les personnes infectées du traitement.

– Penser le niveau territorial et donc améliorer la coordination (rôle des ARS et des COREVIH).

L’enjeu est maintenant est de tenir un discours sans ambiguïté sur la prévention combinée, et sur chaque territoire, d’ajuster les offres de DépistageS VIH à la configuration de l’épidémie, d’en déployer tout le répertoire en s’appuyant sur les professionnels et les associations, d’assurer par des modalités d’accès simplifiées l’arrimage au soin et au traitement dans le décours immédiat du résultat positif du test. C’est à la construction de cette réponse concrète et pragmatique que doivent s’engager tous les acteurs au niveau local. Comme y appellent les leaders scientifiques (Lancet, 2015) pour le dépistage comme pour la PreP (autre innovation majeure des toutes dernières années) : « It’s time to deliver ».