Future loi de santé : les professions réglementées prêtes à entrer en conflit avec le gouvernement
Politique de santé
La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) a menacé le gouvernement d’un « nouveau conflit » s’il refusait d’amender l’avant-projet de loi de santé, qui organise, selon ses déclarations à l’Agence de presse médicale, « l’étatisation de la médecine libérale ».

Les mesures envisagées par Bercy contre les professions réglementées et l’absence de revalorisations tarifaires pour les médecins figurent parmi les principaux griefs énumérés par la confédération. « La CSMF s’opposera à la future loi de santé et à celle sur les professions libérales », a déclaré le Dr Jean-Paul Ortiz, président de cette confédération. Selon lui, « la future loi Touraine constitue un danger majeur pour la médecine libérale. »
De son côté, le syndicat des jeunes médecins biologistes (SJBM) a décidé d’engager des actions communes avec leurs jeunes homologues administrateurs judiciaires, chirurgiens-dentistes, commissaires-priseurs judiciaires, greffiers des tribunaux de commerce, huissiers de justice, mandataires judiciaires, notaires et opticiens, afin de « rétablir la vérité sur le sens et les conditions d’exercice de leur métier et lutter contre la libéralisation sauvage engagée par le Gouvernement. »
Le Dr Thomas Nenninger, président du SJBM, dénonce la volonté du gouvernement « de capter la valeur ajoutée des professionnels réglementés en les salariant et en préemptant des marchés interdits, inscrits dans la Constitution par le Général de Gaulle. » Ces marchés reposent « sur des compétences étendues des professionnels réglementés, une éthique et une déontologie propre à chaque profession, ainsi qu’une délégation de service publique », rappelle-t-il. « Modifier ces principes risque d’avoir des conséquences éthiques lourdes pour la société », prévient-il.
Selon le Dr Nenninger, « cela fait dix ans qu’il y a une demande européenne de libéralisation des différents secteurs. Bercy est en service commandité par l’Elysée, avec une pression de la Communauté européenne pour ouvrir les flux financiers et faire spéculer les fonds d’investissements, avec un affichage de gauche : donner du pouvoir aux français. »
Tout comme le Dr Ortiz, il se dit indigné quant à l’idée suggérée par l’exécutif que « les professions réglementées ponctionneraient six milliards d’euros dans le porte-monnaie des Français. »
Le président du SJBM déplore que « le gouvernement souhaite détruire ce qui structure le pacte social français. » Selon lui, la biologie médicale fera partie des premières à être touchée car « elle constitue une profession frontière et stratégique entre la santé et le commerce, pour laquelle le gouvernement tend à oublier le principe de solidarité et de service, qui la sous-tendent. Le gouvernement fait table rase de dix années de négociation. », poursuit-il.
Au rapport de la Cour des comptes sur les relations conventionnelles entre l’assurance maladie et les professions libérales de santé, qui dénonce l’absence de régulation de la dépense d’assurance maladie liée aux soins de ville (79,4 Md€ en 2013), le Dr Nenninger répond : « Il est anormal que des professionnels dérivent avec des chiffres d’affaires déconnectés de la réalité. Pour autant, la solution n’est pas de détruire les professions libérales mais de négocier, branche par branche, le coût pour la société, le coût pour chaque patient, et le remboursement, afin de favoriser l’utilisateur et de mettre le patient au cœur du système. »
Le rapport souligne pourtant que « les approches interprofessionnelles émergent difficilement, de part des politiques conventionnelles marquées par une succession accélérée de négociations séparées. Ce mode opératoire débouche sur une démultiplication des séquences conventionnelles et une sédimentation des mesures et des avantages accordés, qui nuisent à la perception globale des politiques conventionnelles par les professionnels et conduisent à une complexification progressive du système. »
Mobilisation des jeunes professionnels réglementés
Des actions de mobilisation, menées en coordination avec leurs confrères, dans le cadre de l’élaboration du projet de loi relatif à la croissance et au pouvoir d’achat porté par le Président de la République et son Premier Ministre, devraient être communiquées très prochainement. « 37 professions libérales ont été placées dos au mur. Nous souhaitons défendre notre vision humaniste de la France, en dehors de nos problématiques propres, par des actions communes d’happening, de grèves et de communication sur les réseaux sociaux, avec la presse et avec les patients », a souligné le Dr Nenninger.
La prochaine réunion informelle entre présidents des jeunes professions libérales, pour décider des actions de mobilisation, est fixée au 17 septembre.
De son côté, le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, Emmanuel Macron, a annoncé mercredi 10 septembre, qu’il était prêt à recevoir prochainement les représentants des professions médicales réglementées, avec son homologue en charge de la santé, Marisol Touraine.
« Nous écouterons les uns et les autres. Mais écouter ne veut pas dire rester immobile, a déclaré le nouveau ministre. Notre devoir sera d’augmenter l’activité partout où nous pouvons le faire, […] parce que gagner de l’activité, c’est notre devoir et ma responsabilité. »